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Clin d'œiI au légionnaire Burgens, né comte Hervé de Broca, alias Max Bonnafous
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par Gérard Gilles Epain  extraits google book 


A Phu Tong Hoa et plus tard à Dong Khé les légionnaires furent admirables de vaillance et de combativité. Dans l'histoire de la légion en Indochine, il subsiste un nombre incroyable de faits d'armes d'un invraisemblable héroïsme, prouesses réalisées par des soldats hors normes, qui ont glorifié le corps expéditionnaire.
Parmi les 1 750 hommes du 3° Etranger, un ami m'a rappelé qu'il avait connu à Langson, le légionnaire Burgens, sergent-major à la 4e compagnie du capitaine Antoine Mattei*, le plus dingue et culotté, des capitaines de la légion, un des meilleurs guerrier de l'époque.
En décembre 1947. sur la 3 bis, nous retrouvons Mattei et la 4° compagnie, hobereau autonome du piton de Bån Cao. ll a comme adjoint un légionnaire singulier, le major Burgens. Un homme en quête de virginité, s'était engagé dans la légion en 1945 pour sauver sa peau, car la justice expéditive de l'après guerre l'avait coudamné à mort par contumace. De son vrai nom, le Hervé de Broca,né le l7 juillet 1894 à Tavernay, en Saône et Loire, il fut un dignitaire de Vichy. Engagé  sous le nom de Burgens, il se fera aussi appeler Max Bonnafous.
L'homme avait alors cinquante-quatre ans. Il tentait de se disculper et disait s'être fait légionnaire uniquement pour l'honneur, car possédant en Suisse une belle fortune. il aurait bien pu s'évanouir et disparaître comme bien d'autres, ce qui n'était pas faux. Doté d'une morale toute personnelle, d'une vénalité sans limite et d'un intellect supérieur, Burgens homme avide, était un affairiste incorrigible  qui avait un sens prodigieux de l'organisation, de la débrouille pour ne pas dire de la magouille. Ancien élève de l'école normale supérieure, il était avant la guerre attaché au cabinet d'Edouad Herriot.
Après l'armistice de l940, il est promu, comme le fut de Gaulle dans le ministère Reynaud, sous-secrétaire d'état auprès du maréchal Pétain qu'il vénère et encense. Son quotient intellectuel de surdoué a un penchant maléfique. Il aime l'argent et les affaires lucratives. Celles qu'il fera avec les  Allemands seront sans  doute peu recommandables voire franchement condamnables. A la libération, il est poursuivi et condamné à mon par contumace car il est en fuite.
Nous le retrouvons sept ans plus tard sur la R.C 3. Il est sergent-major à la 4e compagnie du 3e Etranger,sur le piton de BànCao. Le légionnaire n'est pas un couard. Il est décoré et apprécié. Il s'est battu courageusement sous les ordres du capitaine Antoine Mattei. Conquis par l'érudition et la débrouillardise de l'homme, Mattei, très pragmatique l'utilise comme secrétaire et lui a confié la comptabilité de la compagnie. Le major excelle partout.
Dans ce rôle d'adjoint proche, trop intelligent et anormalement instruit, il se montre très serviable et diplomatique. Il est respecté de tous et son entregent fait  merveille à la compagnie.
Une anecdote cocasse entoure le personnage. Elle est née à la suite «d'un incident de guerre», un accroc avec la population locale, quand au cours d'une opération les légionnaires ont mis le feu volontairement à un village Man dont le chef était soupçonné d'aider et de renseigner le viêtminh. Mattei avait omis de signaler l'affaire, banale pour lui. Après qu'une réclamation en dédommagement des villageois, soit parvenue au chef de corps, ce dernier exigera un rapport du chef de Ban Cao. Mattei devra réparer l'oubli et comme cela l'indispose  particulièrement,  il chargera Burgens d'établir le rapport habituel circonstancié.
Burgens va s'appliquer à torpiller cette affaire gênante. Extirpant du code militaire des bribes d'instructions et des renvois de règlements, il fait des interprétations d'une telle complexité et d'une telle ambiguïté que le rapport de plusieurs dizaines de pages, devient totalement incompréhensible et la conclusion est très  favorable à son capitaine.


Le général Gaultier, le dernier patron à Sidi-Bel-Abbès dira que Mattei n'était certes pas l'exemple de l'officier modèle de la Légion. Tête de mulet, d'un courage et d'une témérité aveugle, avec une chance insolente; il était avant tout un chef de bande qui considérait trop souvent les ordres qu'il recevait. comme d'aimables  divagations de son commandement. Naturellement indiscipliné, dans une autre arme que la Légion, ll serait passé en conseil de guerre. Et Gaultier d'ajouter que  l'officier qu'iI avait le plus admiré durant la guerre d'lndochine était... Antoine Mattei, le futur colonel et futur patron du 3e R.E.l de l962 à 1964.




... l'ordonnance de Rommel en Afrique, un dénommé Emil Kalish 1° classe au 3ème Etranger en 1947-1948...


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Constans  vit reclus à Langson. presque fastueusement. César auréolé dans un cantonnement royal, il est entouré d'une garde prétorienne dénommée "la Royale",  une section de légionnaires de haute taille et de grande prestance. Il est chouchouté par le prince des majordomes, le légionnaire sergent-major Burgens. Ce dernier est au paradis, il se surpasse dans l'organisation des réceptions. libations et soupers festifs donnés par son colonel grandiloquent à ses visiteurs et hôtes  de qualité.
Les «crapahutages» sur le terrain ne sont plus programmés sur l'agenda du colonel qui laisse à ses adjoints de tels égarements. Il ne fait que rarement des reconnaissances en piper, perturbé par le mal de l'air, il préfère le calme de ses quartiers. Il ne voit la troupe qu'aux prises d'armes et ne visite plus guère
les postes exposés de la R.C. 4. Les chefs de poste, officiers subalternes, ne le portent pas aux nues. Son laxisme est connu de tous et porte ombrage au
sérieux de la Légion.
Dans le poste de Na Cham, nous retrouvons le capitaine Mattei, qui fidèle à ses mauvaises mauvaises habitudes a rendu sa compagnie quasi autonome. Il se prépare à résister à sa façon, pressentant une dramaturgie prochaine. Ses collègues officiers des autres postes, familiers de la R.C 4. livrés à eux-mêmes, voient aussi l'orage monter, conscients de la détérioration rapide extérieure. Les rapports des patrouilles confirment la présence de plus en plus nombreuse de bataillons viêts dans leur propre secteur, des dizaines de milliers de viêts disent-ils. Leurs avertissements semblent ignorés du grand état-major et le colonel Constans, incrédule, temporise et rassure Hanoï et Saïgon en minimisant l'adversaire. Orgueil et bêtise.
Constans va organiser et diriger le repli de Cao Bang. Il a élaboré l'opération en secret absolu et l'a soumise au général Marchand. Les avis des adjoints et subalternes n'ont pas été demandés. Les Chartons, Forget, Labeaume, Cazaux, Mattei, Allioux et autres Jaugeon, officiers du terrain pouvaient l'éclairer et lui auraient appris assurément bien des choses. par exemple, que la piste de Quang Liêt, sur laquelle il dirigera à l'impromptu, la oolonne Chaton. n'existait que sur les cartes obsolètes fournies par  l'état major de Hanoï.
Quant å la grande opération simultanée dc diversion prévue par Carpentier pour attirer le víêt sur Thaï Nguyên et la R.C 3. elle ne servira à rien, si ce n'est à priver Constans de l'aviation dont il aurait eu grand besoin. Déclenchée un peu avant le repli, elle devait attirer l'attention, l'appâter et entraîner un éventuel glissement de quelques bataillons viêts, suffisamment pour desserrer l'étreinte sur la R.C 4. Elle sera un fiasco total, pis une erreur grossière....

Liens
Cao-Bang et la RC4  forum
L'humiliation de Cao Bang   etc.





























    INDO-CHINE UNE HISTOIRE COLONIALE OUBLIÉE  par Gérard Gilles Epain


























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