:
À la suite de sévères turbulences survenues lors d'un vol de
Continental, plusieurs passagers on été blessés,
dont certains grièvement. Cela n'aurait-il
pas pu être évité ?
: Les
passagers doivent être assis, ceintures attachées au
décollage et à l'atterrissage,
et lorsque l'avion
traverse des zones de turbulences, ce qui est annoncé et
vérifié par
les hôtesses et stewards. De plus, les consignes actuelles sont
de
demander aux passagers d>attacher
leurs ceintures pendant les vols de nuit et de leur recommander de la
conserver attachée pendant les vols de jour pour pallier tout
effet d'une
soudaine turbulence. Exiger que les ceintures soient attachées
pendant
tout le vol ne résoudrait pas totalement le problème. En
effet, il
resterait ceux qui se sont levés pour se détendre dans
les allées, ceux
qui vont aux toilettes, sans oublier les hôtesses et stewards qui
se
déplacent en cabine et qui pourraient être surpris et
victimes de
soudaines turbulences n'ayant
pas pu être prévues par les pilotes.
Il
existe plusieurs types de turbulences : celles dues au "jet-stream" (ces
très forts flux d'air se situant généralement
à l'altitude de croisière des avions de ligne) ;
celles dues au cisaillement sur les bords du "jet-stream" ; celles dues
aux mouvements tourbillonnants sous la base des cumul-nimbus (ces
énormes nuages donnant des éclairs et dans lesquels des
courants
verticaux peuvent atteindre 30 à 40 mètres/seconde, des
pointes à 70
m/s ayant été relevées) ;
celles dues à la traversée d'un
"cumul-nimbus", ou d'un
simple cumulus ; celles dues à la modification de
l'écoulement d'air
sur le relief ; etc... Une des plus courte en temps et en
sévérité, est
celle provoquée lorsque l'avion
passe derrière un gros porteur, où les remous
créés par les gaz d'échappement
peuvent durer plusieurs minutes et être ressentis à des
degrés divers.
: Un
feu
réacteur avant le décollage conduit-il- à ce que
des passagers soient blessés, comme cela s'est
produit dernièrement à Orly sur un A 320 de la compagnie
Vueling ?
: Lorsque
l'avion
est immobilisé au sol, la survenance d'un feu
moteur conduit l'équipage
à procéder instantanément à une
procédure d'extinction,
laquelle ne nécessite pas de déclencher une
évacuation rapide des passagers (avec
déclenchement des toboggans). Ce n'est que
dans le cas où le feu n'aurait
pu être maîtrisé qu'une
telle procédure serait décidée par le Commandant
de bord et mise en œuvre par les hôtesses et stewards (PNC -
Personnel Navigant Commercial ). Le
succès d'une
telle opération dépend donc totalement de leur
réactivité (rapidité,
sang-froid et maîtrise de soi, efficacité, respect de la
procédure,
très bonne connaissance des équipements et de leur
utilisation,... ),
donc
de leur formation. L'occasion
est donc propice de mettre l'accent
sur l'importance
non seulement du rôle commercial du PNC, mais également
sécuritaire. Rappelons qu'en
France le PNC reçoit une formation théorique et pratique
avant d'obtenir
le Certificat
de Sécurité Sauvetage@
diplôme délivré par la DGAC. Puis, il reçoit
une formation théorique
et pratique de spécialisation
sur un type avion particulier (on dit
couramment Aune
qualif,
à l'issue
de laquelle il lui est délivré une Attestation
d'aptitude professionnelle,
renouvelable, après un stage de maintien des compétences (voir
ma chronique de janvier 2006).
:
Boeing ayant annoncé que la première livraison de son
long-courrier B
787 Dreamliner à All Nippon Airlines ne se ferait que fin 2010,
soit
avec deux ans et demi de retard sur son calendrier initial, comment
est-il possible qu'un tel
retard puisse exister ?
: Tout d'abord,
il convient de dire que ce n'est pas
le seul, ni le premier constructeur qui a reporté la livraison d'un
de ses nouveaux modèles. En ce qui concerne le B787 - dont le
premier
vol devrait avoir lieu en fin de l'année - il est
justifié
essentiellement par d'importants
travaux de renforcement du fuselage (dans
une section qui fait le lien entre l'aile et le corps de l'avion). Ce
retard conduira à une importante augmentation des coûts du
programme, étant donné qu'une
charge de plus de deux milliards de dollars est déjà
annoncée; à laquelle s'ajouteront
les pénalités de retard à verser aux compagnies
clientes. Alors, la
question à poser est de savoir si ce retard est de nature
à entacher la
crédibilité de l'avionneur
qui, initialement a connu un énorme succès commercial
ayant enregistré
plus de 800 commandes, soit un montant impressionnant de plus de 140
milliards de dollars ? Il n'est pas
impossible que certaines compagnies envisagent d'annuler
leurs commandes et de reporter leur choix sur l'A350
XWB d'Airbus,
lequel devrait être prêt en 2013. Cela étant dit,
pour ce qui nous
concerne, nous, les futurs passagers, il convient de se
féliciter du
sérieux qui préside à ces décisions qui,
bien que très pénalisantes
pour l'entreprise,
montrent la prédominance accordée à la
sécurité.
:
Récemment les médias ont fait état de tricheries
de la part de personnels de la compagnie Air France. Qu'en est-il
exactement ?
: Bien
que cela ne concerne que le personnel d'Air
France, je réponds à votre question.
Comme
dans beaucoup de grandes entreprises (SNCF,
EDF,...) le
personnel d'Air
France bénéficie de certains avantages liés
à sa spécificité. Le personnel (en
activité ou retraité, ainsi que leurs parents et enfants)
bénéficient
de tarifs réduits en
fonction de certains critères (avec
ou sans réservation, limite d'âge
pour les enfants,...).
Depuis quelque temps, les agents d'Air
France pouvaient faire bénéficier de tarifs très
réduits un certain nombre de personnes (enfants
majeurs ne bénéficiant plus de ces avantages ou
simplement des amis)
à condition qu'ils
soient accompagnés de l'agent
ayant préalablement déclaré leur noms. Puis, ces
différents bénéficiaires ont eu l'autorisation
de voyager seuls, sans être accompagnés. C'est
alors qu'ayant
découvert que certains de ces bénéficiaires
revendaient leurs billets avec une bonne marge de profit (même
sur le très connu site Ebay, Air
France a annulé la possibilité pour ces
bénéficiaires de voyager seul.
Conséquence
de cette décision : Les agents d'Air
France et également et surtout les retraités qui
pouvaient faire voyager seuls leurs enfants et petits enfants
résidants à l'étranger
(Australie,
États-Unis, Mexique, Japon,....) sont
désormais pénalisés, car pour plusieurs raisons (coût,
santé,..), ils
ne peuvent pas, par exemple, se déplacer jusqu'à
Tokyo pour aller chercher leur fils, son épouse et leurs enfants
et
également les raccompagner à Tokyo à la fin de
leur séjour en métropole.
Que
conclure :
1.-
Comme cela arrive assez souvent dans les grandes entreprises, au
lieu de sanctionner les fautifs, on prend une règle
générale qui
pénalise l'ensemble
des agents. Ici, les retraités, après une carrière
à Air France, se
voient brutalement privés de la possibilité de revoir des
membres de
leur famille éloignée de la Métropole, parce qu'il y a
eu des tricheurs.
2.-
Noter la non réaction non seulement des organismes
représentatifs des personnels, mais également celle de l'AAssociation
des anciens d'Air
France@ dont
la vocation première est pourtant la défense de ses
adhérents.
3.- La
publicité faite par les médias peut laisser planer un
doute sur l'honnêteté
intellectuelle des agents Air France. Je peux certifier que tous ceux
avec lesquels j'ai
été en contact au cours de ma carrière - de toutes
fonctions (du
bagagiste au Directeur Général) -
étaient fortement attachés à Aleur
compagnie@ et d'un
dévouement et d'une
moralité irréprochables. Les dérives
constatées ne peuvent donc
provenir que de nouvelles normes de recrutement de personnels et ce
sont ceux qui ont parrainé des noms, auteurs des infractions
relevées,
qui auraient dû être sanctionnés et non pas l'ensemble
de personnel.
: Vous
avez également et probablement reçu la photo qui a
circulé sur le NET
montrant un Airbus encastré dans une barrière
anti-souffle. Est-un
montage ou est-ce vrai ?
: La
question m'a
déjà été posée et j'avais
répondu que, connaissant la rigueur des protocoles d'Airbus,
il convenait d'être
prudent quant à la réalité de cet
événement. Renseignements pris, cet
événement est bien survenu à un A340-600, le 15
novembre 2008, sur l'aérodrome
de Toulouse-Blagnac, lors d'essais
au point fixe à forte poussée.
Bref
résumé. L'avion a
commencé à avancer et a heurté le plan
incliné d'un des
murs anti-souffle qui bordent l'aire d'essais.
Sa partie avant s'est
brisée et a basculé de l'autre
côté et 9 membres d'équipages
ont été blessés, à des degrés divers.
Il s'est
écoulé treize secondes entre le début de mouvement
de l'avion
et le choc avec le mur.
Noter qu'étant
donné qu'il n'était
pas prévu de faire un vol, bien que l'événement
soit considéré par le BEA (Bureau
Enquêtes et Analyse pour la Sécurité de l'Aviation
Civile) comme
un accident, juridiquement, il ne constitue qu'un
incident.
Malgré
toutes le précautions prises, il reste que les facteurs humains
peuvent, une nouvelle fois, être mis en cause, comme le montre le
rapport du BEA :
- qui
précise : Les
essais au sol en phase de réception client s'effectuaient
sous la responsabilité d'un seul
technicien d'essais
sol, employé d'Airbus;
- et
décrit les causes de l'accident
: L'accident
est dû à la réalisation- sans cales et sur les
quatre moteurs à la fois - d'un
essai au cours duquel la poussée était voisine de la
capacité du frein de parc de l'avion. L'absence
de système de détection et de correction des
dérives dans la
réalisation des essais au sol, dans un contexte de pression
industrielle et commerciale permanente, a favorisé la
réalisation d'un
essai en dehors des procédures établies. La surprise a
amené le technicien d'essais
sol à se focaliser sur le système de freinage ; de ce
fait, il n'a pas
pensé à réduire la poussée des moteurs.
Airbus
a indiqué, conformément aux recommandations
formulées par le BEA :
- qu'il
allait créer un nouveau document (intitulé
* Ground
Operations Manual +),
aussitôt en cours de rédaction, consacré aux essais
sol ;
- que
la formation, la session * de
rafraîchissement + sur la
conduite d'essais
moteurs effectuée au simulateur (une
fois tous les deux ans) sera
complétée pour chaque technicien d'essais
sol par un audit interne effectué au cours d'un
point fixe par un technicien * senior +, ceci
afin de favoriser le retour d'expérience
;
- que
la séance au simulateur sera enrichie par le traitement et l'analyse
de cas de pannes pouvant se produire lors des essais du type * point
fixe client +.
(Pour plus
de détails, consulter le rapport du BEA (numéro ISBN :
978-2-11-098259-9 ) sur son site : http://www.bea.aero).
: Ayant
appris qu'un avion
A340 avait été entièrement détruit au cours
d'essais
au sol, pouvez-vous, pour nous rassurer sur le sérieux des
avionneurs,
nous dire qui assure le contrôle de la production ?
: Le BEA
rappelle que la surveillance de la production est
aujourd'hui de
la responsabilité de l'AESA (Agence
Européenne de la Sécurité Aérienne). Le GSAC (Groupement pour
la Sécurité de l''Aviation Civile)
intervient sous contrat de l'AESA en
tant que sous-traitant de la DGAC (Direction
Générale de l'Aviation Civile), dans les
phases suivantes : fabrication d'éléments
d'avions ;
assemblage des avions ; essais au sol et en vol ; livraisons aux
clients.
Cette
surveillance s'exerce
jusqu'à
la délivrance :
- du
certificat de navigabilité (avion
destiné à une immatriculation française) ;
- du
certificat de navigabilité pour export (avion
exporté hors de l'UE);
- du
certificat de conformité au type (avion
exporté dans un pays de l'UE).
La
délivrance de ces documents a lieu après la phase d'essais
au sol et en vol, le ou les vols de livraison au client et le transfert
de propriété.
La
surveillance du GSAC a pour but de s'assurer
que l'avion
livré est conforme à une définition
théorique certifiée et qu'il est
en état de navigabilité.
Elle ne
vise pas à assurer la sécurité des phases d'essais
au sol et en vol. En effet, le GSAC ne dispose pas d'agents
ayant des compétences spécifiques pour la supervision des
essais au sol et en vol.
En
France, le CEV (Centre
d'Essais
en Vol) assure
la tutelle des activités d'essais d'aéronefs
civils et militaires. Un arrêté du 1er juin 1999 demande
-aux organismes effectuant des essais et réceptions d'aéronefs
- de déposer, auprès du directeur du CEV, un manuel d'opérations.
: J'ai appris
qu'il y avait
deux associations d'anciens de
l'aviation : *les
veilles tiges et *les
vieilles racines. Ne
sont-elles pas concurrentes ?
: Elles ne sont
pas concurrentes, mais complémentaires. L'association
* Les
vieilles tiges a
été fondée en 1922 par les pilotes d'avant
la première guerre mondiale et, en 1926, leurs
mécaniciens et
techniciens, avec les constructeurs ont créé leur propre
association
dénommée * Les
vieilles racines ... car
pour que les * Tiges montent,
bien sûr, il faut des * Racines .
: La
reprise des recherches de l'enquête
de la disparition du vol AF4 47 dans l'océan
Atlantique est-elle justifiée étant donné qu'il a
été annoncé que les boîtes noires n'étaient
plus exploitables après un mois ?
:
Certes,
elles n'émettent
plus après un mois, mais peuvent encore conserver les
données plus longtemps.
Rappelons-nous
les deux
premières phases des recherches :
1.- Une
première phase - combinée entre les moyens
français (militaires
et de l'IFREMER - Institut
Français de la Recherche pour l'Exploitation de la Mer) mais
aussi étrangers (US
Navy) -
consistant à faire des recherches acoustiques se termina
mi-juillet 2009, c'est à dire jusqu'à la fin
d'émission des balises.
2.- Une
deuxième phase avait ensuite été menée par
un seul navire, le Pourquoi
Pas -
navire de l’Ifremer
- à bord duquel se trouvaient deux véhicules de
plongée, le sous-marin
Nautile et le robot Victor. Elle a consisté à effectuer
une
cartographie marine en utilisant un "sonar" spécifique, qui a
permis de
ratisser les fonds marins à la recherche de structures
métalliques.
Effectivement,
vient d’être annoncée une troisième phase -
élargie à d’autres pays -
"en vue de ne pas passer à côté de nouveaux
indices" a déclaré le
directeur du BEA (Bureau d’Enquêtes et d’Analyses). Les
mêmes
techniques de recherches seront utilisées, mais avec de nouveaux
bâtiments et d’autres modes de détection susceptibles de
localiser
l’épave et de récupérer les boîtes noires,
malgré les profondeurs
abyssales de la zone du "crash".
Cette
dernière et coûteuse tentative (plusieurs dizaines de
millions d'euros
pour financer plus d’un an de recherche) ayant été
officiellement
déclenchée, il est évident que les
autorités ont estimé qu’il restait
des chances d’aboutir.
Dans
l’hypothèse ou l’épave serait localisée et les
boites récupérées et
exploitées, on imagine l’immense satisfaction qui serait
celle des
familles des victimes, mais également celle de l’industrie
aéronautique
qui, grâce à sa détermination et sa
persévérance, aurait réussi à
récupéré les éléments de preuve
indispensables à la détermination des
causes de ce terrible drame et aux
dispositions à prendre afin d’éviter qu’il ne se
reproduise, montrant ainsi que “la sécurité n’a pas
de prix”.
Il
n’y a donc plus qu’à espérer et être patient, tout
en encourageant par
la pensée tous ceux qui participeront à ce fastidieux
travail de
fourmis.
: À
la suite de l'accident d'un A330 d'Air France
tombé en plein océan, bien que des
prises donnant la vitesse de l'avion ont
été suspectées, on n'en parle
plus ! Pourquoi ?
: Détrompez-vous.
Aux États-Unis, la FAA (Federal
Aviation Administration)
a exigé, sur les avions américains A330 et 340, le
remplacement de deux
sur trois des sondes de vitesse. Cette décision concerne 43
avions
exploités par Northwest Airlines et US Airways.
En
Europe, EASA (Agence
Européenne de la Sécurité Aérienne) vient d'émettre
une recommandation d'interdiction des anciens modèles Thalès, ceux
qui équipaient l'A330
du vol que vous citez.
En
France, Air France-KLM a annoncé il y a un mois, le
remplacement d'une partie des sondes de vitesse (Pitot)
Thalès, par
celles de AGoodrich, sur
ses A330 et A340 .
C *** ---
|