Nombreux sont les lecteurs qui ont montré l’intérêt qu’ils portaient au risque aviaire et aux amerrissages. Bien qu’assez souvent les interrogations fassent référence à des notions, démonstrations qui ne peuvent être résumées en quelques lignes, cette chronique apporte quelques brefs éléments de réponse aux principales questions posées.
- L’amerrissage d'un 707 de la JAL (compagnie japonaise) en baie de San Francisco où tous les passagers ont été sauvés. - L’amerrissage au début des quadriréacteurs, celui d’un DC8 en approche à Los Angeles et également des cas où les avions ont terminé leur course dans l'eau à la suite d’atterrissages longs (Caravelle Alitalia à Marignane ; B 747 Air France à Tahiti). - L’amerrissage, le 21 août 1963 d’un Tupolev 124, dans la Neva près de Saint Petersbourg. - L’amerrissage en plein Pacifique, à proximité d'un bateau, d'un Stratocruiser, vers les années 50/55. Tous les occupants ont été sauvés. La consultation des statistiques en révélerait probablement quelques autres. En ce qui concerne les avions de ligne, ce qu’il convient de retenir, c’est que les cas cités d’amerrissages sont anciens et restent tout à fait exceptionnels. De plus, les équipements de secours (gilets de sauvetage, rampes d’évacuation, canots équipés de matériel de survie,...) sont, de nos jours, au point et le PNC (Personnel Navigant Commercial - Hôtesses et stewards) en connaît parfaitement le fonctionnement et l’utilisation, ce qui a d’ailleurs été démontré lors de l’amerrissage de l’A320 dans d’Hudson River.
Indépendamment des vols d'oiseaux, de nombreux cas ont été relevés d'impacts avec un seul ou deux oiseaux... qui sont invisibles pour les pilotes étant donné la vitesse de l'avion. D'ailleurs, même si le pilote voyait un oiseau en face de l'avion, il serait trop tard pour l'éviter. De toute façon, l’oiseau n’aurait pas le temps de s’écarter de la trajectoire de l’avion étant donnée la vitesse de rapprochement. Sans qu'il y ait eu impact, cela m'est arrivé plusieurs fois et on voit simplement, en une fraction de seconde, passer quelque chose au dessus ou sur les cotés de l'avion.
En ce qui concerne le vol Airways 1549, alors que l’avion venait d’atteindre 1.000 mètres, le commandant de bord a pris plusieurs décisions en un temps record (3 minutes 30) ; choix d’amerrir ; dialogue avec le contrôleur aérien en l’informant de sa décision d’amerrir ; annonce aux passagers ; tentative de remettre les moteurs en marche ; décision de ne pas les "couper", afin de conserver une poussée résiduelle le plus longtemps possible, ce qui a facilité le contrôle de la descente et surtout de l’arrondi final ; réduction de la vitesse ; présentation de l’avion dans une configuration parfaite, comme cela a été vu à la télévision.
J’ajouterai que le copilote a pris l’initiative, en un temps record, de démarrer l’APU (Auxiliary Power Unit) dès le début des « bird strikes », ce qui a permis de conserver toutes les servitudes électriques et hydrauliques.
Bien sûr, il existe une "check-list" amerrissage. Elle permet de mettre l’avion dans la configuration appropriée et de préparer les occupants à l’amerrissage.
Deux principales "boîtes noires" ont, dès les premiers modèles, enregistré des informations sur bande magnétique : le CVR (Cockpit Voice Recorder) enregistre les bruits émis dans le cockpit - donc les conversations entre les pilotes et les messages radio émis et reçus - pendant les 30 dernières minutes du vol. Le DFDR (Digital Flight Data Recorder) enregistre de nombreux paramètres de vol (altitude, vitesse, température, accélérations, etc...) pendant les 25 dernières heures de vol. Ces types d’enregistreurs équipent encore certains avions de ligne. À partir de 1985 environ, l’évolution des technologies numériques a amené le remplacement du support magnétique par une carte mémoire, à base de mémoires non volatiles de type FLASH, d’où l’appellation de SSFDR (Solid State Flight Data Recorder). L’enregistrement sur un support numérique apporte une fiabilité de restitution nettement supérieure à l’enregistrement sur bande magnétique. La miniaturisation de la capacité mémoire a permis d’augmenter le nombre de paramètres enregistrés (plusieurs centaines), les fréquences d’échantillonnage ou la durée d’enregistrement (certains modèles offrent une capacité d’enregistrement de cinquante heures ou plus). L’enregistreur phonique a bénéficié lui aussi de cette évolution technologique, avec non seulement l’enregistrement du son en format numérique, mais aussi une durée d’enregistrement pouvant être portée à deux heures.
Les faits montrent que jusqu’à 70 ans de très nombreux pilotes ont exercé leur métier en toute sécurité. J’en connais plusieurs qui, ayant dépassé 70 ans, continuent à exercer leur fonction d’instructeur ou à piloter leur propre avion, en toute sécurité, ce qui montre que l’expérience et l’âge sont des éléments de sécurité et de compétence supplémentaires et non pas un handicap, dès lors que les contrôles médicaux sont satisfaisants. Après ces commentaires, la réponse : Le commandant Chesley Burnett Sullenberger est né le 23 janvier 1951 à Danville (Californie).
Lorsqu’un planeur de performance (par exemple, le Nimbus IV, de 25 mètres d’envergure) dont la finesse est de l’ordre de 50, est lâché à une hauteur de 1000 mètres, il peut, en maintenant la vitesse dite de " finesse max" (de l’ordre de 95 à 100 km/h) parcourir une distance de 50 fois la hauteur, soit 50 kilomètres. Mais on sait également que le planeur peut (grâce aux ascendances thermiques et dynamiques) continuer à voler en prenant même de l’altitude. L’avion, quant à lui, doit, pour continuer à voler, impérativement perdre de l’altitude. La distance qu’il pourra parcourir dépend, entre-autre, de sa hauteur initiale, de la force et de la direction du vent et aussi de sa vitesse. La distance la plus élevée est atteinte, en configuration lisse (c’est-à-dire train d’atterrissage et volets rentrés) en maintenant la vitesse de "finesse max" (soit environ 175 noeuds sur A320).
C’est ainsi qu’un commandant de bord (20.000 heures ce vol et brevet planeur "F", distance supérieure à 500 km et gain d’altitude supérieur à 5000 mètres) confirme que le commandant Chesley Sullenberger (breveté instructeur planeur), habitué au pilotage des planeurs de grande envergure, savait combien il est dangereux – lors d’un atterrissage forcé – de laisser un saumon d’aile toucher le sol, l’eau ou du blé en herbe, ce qui entraîne a aussitôt un brutal « cheval de bois » (demi-tour de 180 ou plus), pouvant entraîner la rupture des ailes et celle du fuselage, c’est-à-dire la destruction du planeur. Il a donc particulièrement veillé et réussi à se poser les ailes parfaitement horizontales, avec une "assiette de cabré modérée". Les enregistrements des caméras de sécurité ont montré un amerrissage parfaitement rectiligne, une manoeuvre très délicate qui a évité que l'appareil ne se brise en deux.
Sur ce vol Airways 1549, l’intervention du copilote qui a pris l’initiative de démarrer l’APU montre qu’il a été très efficace et que "la valeur n’attend pas le nombre des années !". De toute façon, sachant que le comportement des pilotes dépendra de très nombreux autres facteurs (fatigue, constitution de l’équipage, nature de la formation initiale, conditions météorologiques, altitude de l’avion, temps disponible avant de prendre la décision et de la mettre en œuvre, etc...), il convient donc d’être prudent quant à l’interprétation des décisions prises, comme je l’ai rappelé à plusieurs reprises, ainsi que dans un de mes récents ouvrages. En effet, en cas de survenance d’une panne grave, l’équipage prend sa décision en fonction des informations dont il dispose instantanément, alors qu’il est facile a posteriori, de démontrer qu’elle n’était pas forcément la meilleure. Cela étant dit, il est certain que l’expérience acquise et le fait d’être pilote de planeur ont été des facteurs contributifs qui ont permis au commandant Chesley Sullenberger, assisté de son copilote, d’éviter que l'appareil ne s'écrase sur une zone très densément peuplée ce qui a permis, à la suite d’un amerrissage parfait, le sauvetage rapide des 150 passagers et 5 membres d'équipage.
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Dernière mise à jour/ last updating: 27 févr. 2009 |