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Hommage à
Roger LECLERCQ

 
  Roger LECLERCQ a eu la médaille de l’aéronautique par le général de Gaulle le 14 octobre 1960, suite à la réussite de ses vols de vampires téléguidés, dont un vol  dans le nuage atomique à Reggane le 13 février 1960 .
Il a quitté le CEV en 1962 et est parti travaillé en tant que directeur technique aéronautique chez Jaeger Lecoultre .
Il s’est notamment occupé de l’instrumentation du Concorde qu’il avait débuté au CEV.
Il a fondé à 60 ans une société de consultant aéronautique à la commission européenne de Bruxelles où il a proposé des projets pour le futur, pour les Gifas (france), Rolls- Royce (anglais), et les allemands.
Une fois à la retraite, il était toujours consulté et heureux de savoir que ses projets arrivaient à exécution.

   
 



Une opération audacieuse - et réussie – qui fut conduite par le CEV dans la période 1955-1967

L’épopée des Vampires Télécommandés
par Michel BIGNIER
Cette contribution concerne les activités de Michel BIGNIER alors Ingénieur au Centre d'essais en Vol. M. BIGNIER occupa par la suite d'importantes fonctions au CNES (président) puis à l'ESA.

Voir aussi: ORAL HISTORY OF EUROPE IN SPACE INTERVIEW DE MICHEL BIGNIER Par David Redon 21 octobre 2003 Transcription révisée
 
Je suis entré au Centre d’Essais en Vol de Brétigny sur Orge, comme Ingénieur d’Essais, le 1er octobre 1953, et j’y suis resté jusqu’au 1er MAI 1961. Je fus tout de suite affecté en stage, au Service Méthodes, dont le Directeur était Jean IDRAC : j’étais sous les ordres de Monsieur DESPORTES et mes instructeurs sur les Télémesures et Télécommandes étaient Bernard GOLONKA et Roger LECLERCQ.
DELACROIX eut l’idée de transformer les avions retraités en cibles. L’Ingénieur Général BONTE accepta cette proposition. Le Service Technique Aéronautique refusa cette responsabilité et il fut décidé que le CEV serait maître d’œuvre!
Le choix des avions se porta sur les Vampires 1 qui venaient d’être interdits de vol (pour vétusté) et mis au cimetière sur la base de l’Armée de l’Air à ORANGE. DELACROIX me chargea de mener l’opération et je choisis comme Chef de Projet Roger  LECLERCQ qui s’y consacra à plein temps.

Et les essais de mise au point eurent lieu au CEV de BRETIGNY.SFENA et TURCK avaient chacun équipé un camion avec le matériel au sol. Roger LECLERCQ était le seul télépilote. 

Durant les vols avec pilote à bord, les 2 pilotes qui alternaient étaient CORMERAIS et CASANAVE, 2 très bons pilotes d’essais. Ils avaient comme instruction de toucher le moins possible aux commandes de vol.

Les avions furent prêts en juillet 1957. Il fut décidé, COLOMB BECHAR étant fermé, de faire les premiers lâchés à CAZAUX au mois de septembre. Le Colonel commandant la base était le Colonel AUBRY ancien de Sup-Aéro. Il accepta mais protégea ses radars avec des obstacles antichars ! Trois vols étaient prévus :
§ 1er vol - Parfait mais après l’atterrissage, le train s’effaça et l’avion termina sa course sur le ventre.
 Explication : le train était commandé par une vanne à double effet, alors que nous l’avions cru à simple effet. Il n’y avait que de la tôle froissée et l’avion fut rapidement remis en état de vol.

§ 2ème vol - J’eus la surprise, en arrivant pour le lâché de trouver à côté des radars, le Commissaire de Police d’ARCACHON, qui ayant entendu dire que nous faisions des essais dangereux, était venu se rendre compte. Il resta à côté de moi et je lui expliquai qu’aux USA de très nombreux avions volaient sans pilote (ce qui était faux) et que les vols se passaient sans accident. Le vol fut à nouveau parfait, mais à l’atterrissage, il y avait un fort vent à 45° de la piste. L’avion se présenta mal et LECLERCQ décida de remettre les gaz. L’avion passa à faible hauteur au dessus des spectateurs, refit un tour de piste et se représenta correctement. Après l’atterrissage, je dis au Commissaire de Police, que nous étions sûrs de nous et que la remise des gaz était classique. Nous avions eu très chaud, mais le matériel était intact.

§ 3ème vol - Vol parfaitement correct, mais au retour sur la base, l’avion s’inclina sur le côté gauche et resta bloqué, les ailes étant à 30°. Il fut impossible de le rétablir en ligne de vol et nous donnâmes l’ordre au pilote de l’avion d’accompagnement, qui était armé, de détruire le Vampire récalcitrant. L’Adjudant Chef CASANAVE, qui avait été dans la chasse, se mit en position de tir, mais chaque fois qu’il était prêt à faire feu, BISCAROSSE était dans l’axe de tir. Il renonça. LECLERCQ agita frénétiquement le «télémanche» et l’avion se remit brusquement en ligne de vol et finalement fit un atterrissage superbe.

Après ces 3 vols, le matériel fut qualifié. On dut choisir entre TURCK et SFENA. Les performances étaient équivalentes et le choix fut difficile. DELACROIX et moi, nous choisîmes les équipements TURCK, peut-être moins jolis mais très robustes et donc plus sûrs. Leurs réglages étaient aussi plus faciles.
 
Mentionnons encore, la participation d’un Vampire télécommandé à REGGANE pour la première bombe atomique française. Roger LECLERCQ se déplaça à REGGANE en janvier 1961 avec un Vampire télécommandé équipé de capteurs nucléaires. Tout de suite après l’explosion, le Vampire traversa le cœur du nuage créé par la Bombe et il se posa au sol mission accomplie.

L’Armée de l’Air affecta 20 nouveaux avions retraités et ils furent tous équipés de TM et de TC TURCK.
Ils furent employés comme cibles à COLOMB BECHAR de 1962 à 1967. Un avion effectua un record : il fit 8 vols avec succès, sans être touché par des engins tirés contre lui.
Rendons hommage au Sergent GOURLAOUEN qui convoyait un avion en Algérie et qui à la suite d’une panne moteur, qui n’avait rien à voir avec les Equipements TURCK, sombra en mer Méditerranée
 
Ainsi se termina l’épopée des Vampires Télécommandés.
Michel BIGNIER

           Mai 2006.. 

LA SAGA DES VAMPIRE TÉLÉCOMMANDÉS
Jean DESPORTES
ancien chef du service des Méthodes et Moyens d’essais du CEV.

INTRODUCTION
L'article qui suit relate une opération audacieuse - et réussie – qui fut conduite par le CEV dans la période 1955-1967. Cet article est extrait d’un ouvrage intitulé : "Société Anonyme de Télécommunications : Un siècle d’aventure humaine et industrielle" publié en 2008 par l’Association pour le souvenir de la SAT, reproduit ici avec l’aimable autorisation de cette Association. La SAT, maintenant disparue, fut impliquée dans cette opération pour la fourniture des matériels de télépilotage, télécommande et télémesure, initialement développés par les Etablissements Jean Turck, dont elle avait repris l’activité et assurait les développements et la production. Cet article comporte le récit de Michel Bignier responsable de l’opération au CEV.

Comme on a besoin de cibles volantes pour permettre d’une part l’entraînement des pilotes et d’autre part les essais des premiers "engins spéciaux", un ingénieur du service Armement du CEV, Michel Bignier, dont on lira ci-dessous le témoignage, a l’idée d’utiliser les premiers avions à réaction Mistral mis en service dans l’Armée de l’air.

Arrivés en fin de vie et stockés à Orange, ces avions, version française des Vampire britanniques, délestés du pilote et de l’armement, constituent des cibles rapides et très maniables.

La télécommande Turck y est utilisée en association avec l’équipement de pilotage automatique réalisé par SFENA. Celui-ci assure un vol stabilisé et reçoit, par la télécommande, les ordres de cap, d’altitude et de vitesse destinés à assurer le télépilotage. Après des essais préliminaires sur un Nord 1100, puis des essais en France sur Mistral, on passe à une utilisation systématique sur le polygone d’essais du CIEES à Colomb Bechar en Algérie.

On forme alors quelques spécialistes "télépilotes" et comme il faut éviter que les cibles indemnes ne soient endommagées à l’atterrissage, on perfectionne le système en dédoublant la station de commande : l’une placée en bout de piste permet de maintenir l’avion dans l’axe, tandis que l’autre, située latéralement et assez loin de la piste, sert à piloter la descente et l’arrondi final

Poste de pilotage au sol  (Coll. AAEV)

Bloc de commande (Coll. AAEV)
 

Le plus "chanceux" de ces avions cibles fit huit vols sans être atteint…Cette activité se poursuivra à la SAT et finalement une centaine d’avions seront équipés à  l’AIA d’Aulnat, à Clermont-Ferrand.

autre article……

Contribution de N°54 - Jean Louis LAVOISARD

 Poursuivi par le Vampire ...

 
Le Vampire dont il s'agit, c'est le premier chasseur à réaction conçu par le constructeur britannique DE HAVILLAND après la fin de la seconde guerre mondiale. Il fut construit en de nombreux exemplaires y compris en France, par la SNCASE sous le nom de Mistral. Environ 250 exemplaires au total équipèrent l'armée de l'Air française entre 1949 à 1960, avant de céder leur place aux "Ouragans" de DASSAULT.




Je n'ai jamais approché un "Vampire" à moins d'une dizaine de mètres et pourtant j'en ai un souvenir tenace qu'entretiennent, de temps à autres, des piqûres de rappel.